Pourquoi la tendance de la microaventure est une fausse bonne nouvelle

 

Ces derniers temps, la microaventure a le vent en poupe. Et le Covid 19 de renforcer la tendance. A priori, le tourisme de demain sera (davantage) de proximité. Alléluia.

À vrai dire, on le savait déjà. Depuis que Sylvain Tesson a délaissé sa cabane en Sibérie pour les chemins noirs de l’Hexagone ; depuis que Frédéric Lopez est passé des steppes mongoles à Nos Terres Inconnues dans les Cévennes ; depuis que le mot microaventure est sur toutes les lèvres des pros du tourisme que nous rencontrons depuis 3 ans. On avait plutôt vu venir le coup et on a même tout fait pour que la sauce prenne.

Pourtant, quand on entend les pros du tourisme dire qu’ils vont se recentrer sur la France et créer des nouveaux business pour répondre à ces nouveaux besoins ; quand L’Obs titre La « micro-aventure » : la tendance qui monte, passées les 5 minutes de gloire, on doute. Est-on en train de participer à dénaturer ce que l’on trouve formidable ?

En plein confinement, on peut déjà acter que la prise de conscience est générale, l’envie de voyager différemment est là, mais rien ne prouve qu’on fera mieux après. Tout reste à faire, à commencer par changer le système. Et en entier, s’il vous plait.

Pourquoi on a un peu peur :

1. Parce que qui dit tendance, dit accroissement significatif et marchand, et donc une altération du concept d’authenticité. Or l’authenticité, c’est la définition même de l’aventure.

 
 

2. Parce que cet accroissement obéit à des comportements humains immuables :

3. Parce que ces comportements ont des conséquences néfastes directes :

 
 

Le sur-tourisme c'est LA problématique : spéculation immobilière, trafic saturé, environnement en danger.

  • À Barcelone les habitants ne peuvent plus se loger à cause de la hausse des loyers (Merci Airbnb).

  • Dubrovnik est envahie suite au succès mondial de Games of Thrones.

  • Les touristes ont ruiné la végétation du canyon de Fjaðrárgljúfur, en Islande, où Justin Bieber a tourné un clip.

  • Le Machu Picchu et les temples d’Angkor sont menacés.

  • Et en France ? Bah Pareil. 25.000 personnes/an au Mont-Blanc, la vallée croule sous la surfréquentation. Pareil à Etretat.

4. Parce qu’on parle de nature. Donc d’écosystèmes fragiles qui ne supporteront pas un tel accroissement.

5. Parce que l’aventure est un art de vivre. Sitôt qu’on la monnaie, la package, la standardise, elle disparaît.

Ok, on est mal barré, mais qu’est-ce qu’on peut faire ?

Grande question. Changer nos modèles de réussite et de consommation, rien que ça. En basant nos comportements et nos business plan sur des notions un brin désuètes de nos jours : le bon sens, la modération et le respect (des autres, de la nature, de tout).

Plus concrètement, on a quelques pistes (non exhaustives) pour pratiquer la microaventure le plus intelligemment possible :

 

Perso, on a choisi de hacker le système.
À notre échelle d’abord, parce qu’il faut toujours commencer par soi.

On a choisi de rester libre, financièrement indépendant, pour pouvoir tout faire à notre sauce avec nos règles du jeu. On a choisi de travailler, communiquer, gagner de l’argent différemment et d’être entrepreneur d’intérêt général avant d’être marketeux ou CEO. Notre mission c’est de donner des clés, de faire réfléchir, de créer des déclics, d’inventer des solutions. Eduquer plutôt que pousser à consommer (et c’est drôlement plus difficile).

Concrètement, au bout de 3 ans, on en est là :

>
Un livre sorti chez Gallimard en 2019. On y livre notre philosophie de l’aventure, des conseils et idées de base pour se lancer aux travers de 34 exemples d’aventures. On ne sortira pas 5 tomes supplémentaires de ce livre, car on a déjà tout dit. Ne comptez pas sur nous pour défricher et répertorier l’aventure en France en long et en large. Débrouillez-vous, réfléchissez, inventez par vous-même. L’aventure n’est pas un itinéraire à suivre, c’est une expérience singulière personnelle. C’est notre unique message.

> Un incubateur de week-ends. Pour mettre en relation ceux qui ne sont pas en mesure de s’élancer seuls. 

 > Des articles pour prendre de la hauteur. Comme celui-ci. Parce que ça nous semble nécessaire.

 > Timbrées, la première newsletter déconnectée. Parce qu’il faut inventer d’autres manières de se parler.

> Des workshops “Créateur de microaventure” : pour apprendre à créer sa propre aventure.

> Des conférences pour donner envie de voyager différemment.

> Des rencontres avec les pros du tourisme pour créer des déclics, défendre notre vision et trouver des solutions concrètes pour le tourisme de demain.

> Des rencontres avec les pros de la com et du marketing pour remettre en question les pratiques habituelles (cf. nos règles du jeu)

En conclusion : est-ce qu’on participe potentiellement à désacraliser notre chère Aventure ? OUI. Mais on va continuer.

Car on n’est pas vraiment sûr d’être remplacé par des acteurs ayant les mêmes engagements que nous. On va donc batailler dans les années à venir pour que la microaventure ne devienne pas une industrie comme une autre et reste avant tout, un art de vivre.

 

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Edito & graphisme : Amélie Deloffre
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